DÉVELOPPÉS PAR LE LABORATOIRE CESCO (CENTRE D’ÉCOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA CONSERVATION) DU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE, VIGIE‐NATURE EST UN PROGRAMME DE SCIENCES PARTICIPATIVES REGROUPANT UN ENSEMBLE D’OBSERVATOIRES DE LA « BIODIVERSITÉ ORDINAIRE ». CES OBSERVATOIRES INVITENT DES VOLONTAIRES À RÉCOLTER DES DONNÉES SUR LA FLORE ET LA FAUNE EN FRANCE MÉTROPOLITAINE.


Initié il y a plus de 20 ans avec le Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) créé en 1989, le programme Vigie‐Nature s’est renforcé depuis avec le suivi de nombreux groupes : les papillons, chauves‐souris, escargots, insectes pollinisateurs, libellules, plantes.

On compte aujourd’hui une quinzaine d’observatoires développés pour diverses taxons et à destination de plusieurs types d’observateurs. Vigie‐nature rassemble des milliers de participants volontaires (environs 15000 par an), et compte des centaines de milliers d’heures d’observations sur toute la France métropolitaine.

Ce projet de sciences participatives poursuit un triple objectif : (i) scientifique, en visant la collecte d’un grand nombre de données standardisées sur la biodiversité à large échelle spatiotemporelle; (ii) pédagogique, en tentant de renforcer l’importance accordé à la biodiversité par l’observation de la nature; (iii) politique, via la production d’indicateur d’état de la biodiversité et de scénarios d’évolution pouvant être pris en compte dans les politiques publiques, contribuant ainsi à faire connaitre la crise actuelle de la biodiversité.

Ces suivis reposent sur l’établissement de protocoles standardisés, respectés par l’ensemble des observateurs sur l’ensemble du territoire exploré et maintenu dans le temps. Les protocoles doivent donc être adaptés à la fois aux particularités biologiques des organismes, aux connaissances et capacités des observateurs et aux objectifs scientifiques. Afin que les analyses spatiales et temporelles aient un sens, les variables collectées sont choisies pour être porteuses d’informations significatives sur l’état de la biodiversité : ce sont d’abord l’identité et l’abondance des espèces, d’autres variables descriptives étant intéressantes (phénologie…).

Partenariat et structure du réseau :

La majorité des observatoires reposent sur des partenariats avec des associations d’étude et de protection de la nature. Ces partenariats prennent des formes variés en fonction des observatoires mais d’une façon générale, les chercheurs du muséum sont chargés d’analyser et de valoriser les données issues des observations par la production de publications scientifiques, d’indicateurs d’état de la biodiversité et par un retour des résultats aux observateurs ; les associations sont en charge de l’animation des réseaux d’observateurs et d’apporter une expertise naturaliste aux projets. Au niveau local, un tissu de relais porte les observatoires grâce à des sorties de terrain, des animations ou des formations. Ces relais sont de nature diverse en fonction des publics (collectivités, associations, académies, chambres d’agriculture, etc.)

Dans ce type de projets réunissant plusieurs acteurs interagissant autour d’un même objet, un enjeu majeur est l’identification des attentes et des objectifs des différents acteurs du projet, qui peuvent être très variées. Ainsi L’identification et la prise en compte de ces attentes en amont est un gage de bon déroulement du projet.

 

Quelle recherche autour des sciences participatives :

L’apport des citoyens à la connaissance scientifique est aujourd’hui indispensable. En effet, la participation de volontaires permet de récolter une grande quantité de données sur l’ensemble du territoire et de manière répétée dans le temps, données que les chercheurs n’auraient pu obtenir seuls.

Les programmes de Vigie-Nature permettent de caractériser l’état et la dynamique de la biodiversité, c’est-à-dire la composante écologique des socio-écosystèmes, susceptible d’intéresser les différents acteurs de la biodiversité. Au Muséum national d’Histoire naturelle, et plus particulièrement au Centre des Sciences de la Conservation (CESCO) de nombreux chercheurs en écologie et en Sciences Humaines travaillent autour de ces programmes de Sciences participatives :

  • Approches en écologie de Vigie-Nature : les données de vigie nature participent à l’élaboration et l’amélioration des métriques caractérisant la biodiversité, sous forme d’indicateurs. Ces grands jeux de données permettent d’étudier les réponses de la biodiversité aux changements environnementaux à des échelles écologiques, spatiales et temporelles peu considérées ailleurs. 
  • Approches psycho-sociologiques de Vigie-Nature : les sciences humaines et sociales permettent d’étudier les conséquences de l’acquisition de connaissances pour les représentations de la biodiversité par les différents publics, les enjeux sociaux liés aux espèces remarquables et à la nature ordinaire, la construction de stratégies d’acteurs et de politiques publiques qui lient (ou non) biodiversité et développement.

Depuis 2002, les données issues de Vigie-Nature ont permis d’alimenter :

  • 12 thèses de doctorat soutenues, 11 en cours
  • 99 publications dans des revues scientifiques
  • 37 rapports de stages
  • 259 documents divers produits

http://vigienature.mnhn.fr/bibliographie

https://www.zotero.org/groups/vigie-nature/items

Exemple d’une recherche menée : comprendre l’impact de l’Homme sur la biodiversité

Prenons l’exemple d’un article de 2016 publié par Benoît Fontaine, chercheur au CESCO. Il montre que l’impact négatif de l’urbanisation sur les pollinisateurs peut être limité localement par les caractéristiques du jardin et les pratiques de jardinage (types de plantes présentes ou utilisation de pesticides) : des pratiques prenant en compte les besoins des papillons sont efficaces même dans les zones très urbanisées, où les jardins représentent des refuges pour les espèces sauvages. Ces résultats montrent également la puissance et la valeur des données collectées dans nos programmes même si nos observateurs n’ont pas de connaissance naturaliste.


Scolaires et Sciences participatives : Vigie Nature Ecole

Vigie-Nature École, déclinaison pour les scolaires du programme de sciences participatives Vigie-Nature, vise notamment à offrir aux enseignants un outil permettant d’ancrer le discours sur la biodiversité dans le concret et la proximité afin de faire prendre conscience des enjeux liés à l’érosion de la biodiversité.

Sept observatoires, accessibles de la maternelle au lycée, permettent d’étudier des groupes variés sur toute la France métropolitaine : escargots ; insectes pollinisateurs ; chauves-souris ; vers de terre ; flore urbaine ; oiseaux ; algues et coquillages. La conception et le développement de ce programme ont été confiés à un enseignant de Sciences de la Vie et de la Terre, en lien avec l’inspection générale du ministère de l’Éducation nationale, pour que la mise en œuvre de Vigie-Nature École dans une classe s’intègre parfaitement aux programmes scolaires.

Les protocoles d’observation permettent aux élèves de découvrir, tout autour d’eux, une biodiversité souvent insoupçonnée. En réalisant des observations, ils comprennent alors l’importance de leurs actes quotidiens et le rôle qu’ils peuvent jouer dans la préservation de la biodiversité. Les questions soulevées lors de la participation à Vigie-Nature École illustrent les menaces qui pèsent aujourd’hui sur la nature. Enfin, les protocoles proposés permettent aux élèves de récolter des données réellement utiles aux chercheurs ; elles alimentent, d’ailleurs, des bases de données nationales.

Suivis vs inventaires :

Les données sur la biodiversité sont de deux grands types : données opportunistes, c’est-à-dire collectées au gré des observations, et données produites avec un plan d’échantillonnage et un protocole assurant une standardisation. Les données d’observation collectées par les naturalistes au cours de leurs activités, souvent de loisir, sont en grande majorité des données opportunistes. Elles constituent des corpus très importants, saisis dans des bases de données telles que e-bird, l’INPN, Observado ou Biolovision, qui contiennent des millions de données. Les données standardisées sont récoltées selon un protocole, respecté sur l’ensemble des sites suivis et maintenu au fil du temps. Elles sont de fait beaucoup moins abondantes, mais plus facile à analyser puisque leur standardisation permet des comparaisons spatiales et temporelles. Elles sont produites dans le cadre de programmes de sciences participatives tels que ceux de Vigie-Nature, du Feeder Watch américain ou du Breeding Bird Survey britannique. La question qui se pose est donc la suivante : en fonction des questions de recherches et des données potentiellement disponibles, comment choisir entre données opportunistes, très abondantes mais peu précises, et données protocolées, moins nombreuses mais standardisées ?


Réseaux Sciences participatives biodiversité :

France : http://www.naturefrance.fr/sciences-participatives/le-collectif-national-sciences-participatives-biodiversite

Europe : https://ecsa.citizen-science.net/

Monde : http://citizenscience.org/

Sciences participatives en France : Rapport Houllier :

À la demande des ministres en charge de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, François Houllier, Président-Directeur général de l’Inra a été missionné pour conduire une réflexion sur les sciences participatives en France.

[Sciences participatives : expression f. p. formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels — qu’il s’agisse d’individus ou de groupes — participent de façon active et délibérée. expressions liées : sciences citoyennes, recherches participatives, crowdsourcing, etc.]

http://www.sciences-participatives.com/Rapport

https://inra-dam-front-resources-cdn.brainsonic.com/ressources/afile/320323-7bb62-resource-rapport-de-la-mission-sciences-participatives-fevrier-2016.html